Jeudi 24 octobre – Centre de colloques, salle 3.01, de 9h30 à 12h30

Co-organisateur·ice·s :

Romain Cazaux (CEMS, EHESS) & Lucile Garnier (AAU-CRENAU, ENSA Nantes et Nantes Université)

Discutant :

Laurent Devisme (ENSA Nantes et Nantes Université, AAU-CRENAU)

Si la fin des territoires semblait annoncée dans un monde nappé de réseaux, il semble que nous assistions plutôt à une complexification des configurations territoriales. Pour suivre des migrations et décrire de multiples appartenances, analyser le retour de conflits à forte dimension territoriale, comprendre l’intense production de territoires dans le cadre d’actions publiques, ou montrer l’ancrage spatial d’infrastructures et leurs effets sur des groupes sociaux, la notion de territoire est entrée à l’agenda de nombreuses recherches transdisciplinaires, induisant un élargissement sémantique du terme. Plutôt que de restreindre les propositions à une définition unique, qui ne permettrait pas de saisir l’étendue de ses usages, nous proposons de considérer la notion de territoire dans sa polysémie. Trois dimensions permettent généralement de la distinguer d’un espace, d’un lieu ou d’un réseau : i) une dimension identitaire : c’est un découpage spatial au sein duquel apparaît une certaine unité sociale distincte d’un ailleurs et par lequel une identité individuelle ou collective se façonne ; ii) une dimension d’appropriation, allant de l’espace contrôlé-borné à des formes moins instituées de territorialités ; iii) une dimension topographique, qui qualifie tant un agencement de ressources matérielles et symboliques dans un espace donné que la figuration de cet agencement. Les propositions de communications pourront trouver une place dans l’un des trois axes suivants. Un premier axe interrogera, dans une perspective méthodologique, le passage du terrain au territoire. Si l’étude d’un espace délimité est le point de départ de l’enquête ethnographique, comment concilier ce bornage avec celui des territoires de pertinence d’une société étudiée ? Comment suivre l’étendue des appropriations territoriales d’un individu ou d’un groupe social lorsque celle-ci dépasse le cadre d’une maison, d’un quartier ou d’un village, plus aisément appréhendables par l’ethnographe ? Comment passer d’observations in situ et de descriptions d’espaces vécus à l’identification de formations et de configurations territoriales ? Un deuxième axe dépliera l’intérêt épistémique de la méthode ethnographique pour penser à nouveau frais la notion de territoire. Des oppositions usuelles (réseau/territoire, local/global) se retrouvent souvent percolées dans le nœud de l’enquête. Quels déplacements conceptuels peuvent alors être amenés par l’enquête ethnographique ? Comment l’observation de terrain nous aide-t-elle à suivre l’émergence de nouvelles formes de territorialités, qualifiées parfois de multisituées ou de non contiguës, de réticulaires ou d’archipélagiques ? Enfin, un troisième axe s’intéressera, dans une perspective plus pragmatique, aux territoires tels qu’ils sont mobilisés et instrumentalisés par des groupes sociaux dans le cours d’actions collectives. Comment des territoires (métropolitains, ruraux, villes moyennes) poussent-ils des collectifs à agir ? Quelles porosités trouver entre les territoires des institutions et du pouvoir, et ceux de la vie quotidienne ? Quelles bifurcations et recompositions émergent
de ces frictions entre territorialités endogènes et territoires exogènes ?

Intervenant·e·s :

Laz Brulé Kopp (CMH, EHESS) : Qui sont aujourd’hui les aspirants à l’installation agricole ? L’exemple d’un territoire d’élevage laitier à l’avenir incertain

Eliott Ducharme (LVMT, Université Gustave Eiffel) : Ethnographie de la marche à pied en périphérie populaire de Mexico, une approche par le « territorio-cuerpo »

Mathilde Vassor (GRIPIC, Sorbonne Université & Dicen-IDF, Université Paris Nanterre) : Médiations et formation des relations de voisinage : interroger la construction conjointe du terrain et du territoire

Bibliographie :

Baudin, G., & Bonnin, P. (2009). Faire territoire. Paris, Éditions Recherches.

Debardieux, B., Ferrier, J.-P., & Lévy, J. (2003). Territoire. In J. Lévy, & M. Lussault, Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés. Paris, Belin, p. 907-917.

Jean, Y., & Calenge, C. (2002). Lire les territoires. Tours, Presses universitaires François-Rabelais.

Jessop, B., Brenner, N, & Jones, M. (2008). Theorizing Sociospatial Relations. Environment and Planning D : Society and Space, 26(3), p. 389‑401.

Marcus, G. E. (2010). Ethnographie du/dans le système-monde. L’émergence d’une ethnographie multisituée. In D. Cefaï, L’Engagement ethnographique. Paris, Éditions de l’EHESS, p. 353-395.

Marié, M. (2004). L’anthropologue et ses territoires. Ethnologie française, 34(1), p. 89‑96.

Raffestin, C. (1986). Écogenèse territoriale et territorialité. In F. Auriac, & R. Brunet, Espaces, jeux et enjeux. Paris, Fayard & Fondation Diderot, p. 175‑185.

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